Conférences plénières

Giuseppe LONGO

Directeur de Recherche, CNRS (DR Émérite)
Centre Cavaillès, CNRS & École Normale Supérieure, Paris
https://www.di.ens.fr/~longo/

Titre conférence : Peut-on comprendre la complexité biologique en termes de complexité physique ?

Résumé :

Plusieurs notions « d’émergence » ont été proposées en physique, au cœur de diverses approches de la « complexité ». Ils concernent principalement l'émergence de nouvelles structures et formes (morphogenèse). De l’analyse de la morphogenèse de Turing et Thom à l’auto-organisation en thermodynamique loin de l’équilibre en passant par les réseaux de Parisi, plusieurs types de phénomènes émergents dans les systèmes complexes seront rappelés. Ensuite, la différence sera soulignée avec la « production de nouveauté » en biologie, notion très différente fondée sur une bonne compréhension de l'historicité des phénomènes. Dans l’évolution darwinienne, en particulier, les cadres conceptuels (et éventuellement mathématiques) nécessitent la construction de nouvelles perspectives, en raison de la nature des observables visés et de leur spécificité historique. La question de « l'unification » avec les nombreuses théories de la matière inerte impliquées dans la compréhension de la biologie sera évoquée, en posant des ponts et en proposant des dualités conceptuelles.

Biographie :

Giuseppe LONGO est directeur de recherche émérite (DRE) CNRS au centre interdisciplinaire Cavaillès de l’École Normale Supérieure, Paris (ENS). Ancien DR CNRS en mathématiques et, puis, en informatique, à l’ENS, il a été professeur de logique mathématique puis d’informatique à l’Université de Pise. Il a passé 3 ans comme chercheur et professeur invité aux USA (successivement à Berkeley, au MIT et à Carnegie Mellon) ainsi que plusieurs mois à Oxford (GB) et Utrecht (NL). Il a été fondateur et rédacteur en chef (1990-2015) de Mathematical Structures in Computer Science, une revue scientifique majeure de l’Université de Cambridge, de deux collections de livres et co-auteur d’une centaine d’articles et de cinq livres, dont nombreux en collaboration avec des physiciens et des biologistes. Son projet actuel développe une épistémologie des nouvelles interfaces explorant les corrélations historiques et des alternatives à la nouvelle alliance entre formalismes computationnels et gouvernance de l’homme et de la nature par les algorithmes et par des méthodes « d’optimalité » prétendument objectives.

Alain BERTHOZ

Professeur Honoraire au Collège de France.

Titre conférence : Simplexité et vicariance, inhibition créatrice : le cerveau face à la complexité et la pathologie

Résumé :

Au cours de l’Evolution, pour faire face à un monde complexe, ou domine l’incertitude, et à la complexité du cerveau, les organismes vivants ont mis au point des solutions. Ces solutions sont des principes simplificateurs à tous les niveaux de l’approche du vivant. Depuis le niveau moléculaire, ou génétique, jusqu’au comportement individuel et social. Ils ne sont pas simples, ils sont parfois apparemment plus complexes, ils sont SIMPLEXES, Notre cerveau met en jeu par exemple, la modularité, la « division du travail », l’anticipation et la prédiction probabiliste, la redondance, les mémoires pour prédire, des modèles internes, des détours, de multiples espaces et référentiels, l’INHIBITION créatrice, l’émotion et la VICARIANCE. Je donnerai des exemples de recherches expérimentales de neuroscience cognitive concernant la perception, le mouvement, la mémoire spatiale et la navigation et leurs pathologies neurologiques et psychiatriques. Enfin j’évoquerai le développement chez l’enfant de ces merveilleuses solutions qui permettent à la fois l’adaptation, l’apprentissage innovant et même la tolérance.

Biographie :

Alain BERTHOZ est Professeur Honoraire au Collège de France (Centre Interdisciplinaire de Biologie du Collège de France). Ingénieur Civil des Mines, Licencié en Psychologie et Docteur es Sciences en Biomécanique et en Neurosciences. Directeur du Laboratoire de Physiologie de la Perception et de l’action CNRS/Collège de France. C’est un expert de la physiologie des systèmes sensorimoteurs, système vestibulaire, bases neurales du regard et de la marche, bases neurales de la mémoire spatiale et des géométries du cerveau. Il fut un pionnier de l’usage de l’imagerie cérébrale (IRM, MEG etc..), ainsi que la réalité virtuelle. Il travaille sur la rééducation des déficits perceptifs, moteurs, et cognitifs chez l’enfant ayant des pathologies neurologique et psychiatriques et les bases neurales de l’empathie, de la représentation de soi, et la relation avec les avatars numériques. Il a dirigé de nombreuses expériences de Physiologie humaine à bord des stations spatiales. Il a participé à des projets internationaux entre neuroscience et robotique sur les robots humanoïdes et le retour d’effort. Il préside le comité d’orientation du programme Cerveau, Culture, et Société de l’Institut d’Etudes Avancées de Paris. Il a publié plus de 300 articles scientifiques et publié de nombreux ouvrages. Lauréat des Grand Prix du CEA de l’Académie des Sciences et prix de l’Académie de Médecine, Prix Rossi de l’Université de Pavie, Prix Dow de Neuroscience de l’Université de Portland, Prix Castang de la Société Européen de Neurologie développementale (2015), et Prix Hallpike-Nylén (2016) de la Société Barany de Physio-pathologie Vestibulaire. Il est membre de l’Académie des Sciences et de l’Académie des Technologies ainsi que de plusieurs Académies étrangères (Académie Américaine des Arts et des Sciences, Académies Royale de Médecine de Belgique et Académie Royale des Sciences de Belgique (2016) et Académie de Médecine de Bulgarie. Médaille d’Or de la Société Arts et Sciences. Professeur Honoris Causa des Universités de Mons, et de Salerne (2016). Officier de l’Ordre de la Légion d’Honneur et de l’Ordre du Mérite. Commandeur de l’Ordre du Mérite de la République Italienne.

Intermèdes socio-culturels 

Georges Laurent, peintre limousin

Des peintures de Georges Laurent seront exposées durant et sur le lieu du colloque.

Né le 28 janvier 1927, ses premières années glissent de Limoges vers l’Oise, jusqu’à Paris, non loin du Louvre. Dans cet environnement propice, Georges Laurent développe très tôt le goût de la peinture savante, des musées et des galeries. Au Louvre, l’adolescent découvre la «grande peinture », les primitifs italiens ; c’est ainsi qu’éclot une intarissable envie de dessiner et de peindre.

On devine dans ses croquis et études de jeunesse un dessinateur intuitif et fougueux, doté d’un incroyable sens graphique qu’il ne va cesser de parfaire. Tous objets ou sujets qui passent sous son crayon sont circonscrits d’un cerne noir qui délimite fermement l’enveloppe des choses tandis que sa ligne, étonnamment mobile, fouille dans le détail et se permet toutes sortes de bifurcations.

Dans un trou de verdure au bord du Plateau des Millevaches, il aménage un monde à sa convenance : un atelier aux volumes singuliers, où il consacre à la création tout un pan de sa vie. Là, il dessine, peint, découpe et colle, assemble des matériaux de toutes sortes, collectés, pliés, teintés. Et l’exercice de la main ne s’arrête jamais, produisant des centaines, des milliers d’œuvres, conservées et consignées, du format le plus modeste de quelques centimètres à la composition la plus monumentale.  

Que trouve-t-on sur ces dessins, toiles, rouleaux et assemblages ? Une vaste réorganisation du monde par la fragmentation, la géométrisation et la simplification du réel, comme un jeu de puzzle sans cesse recommencé, sans cesse réinventé, le monde se dotant de nouvelles pièces et coloris. Son Cubisme est érudit et joyeux, explorant toutes les potentialités offertes par la transformation du réel, par la fragmentation, la géométrisation des formes, la multiplication.

Son œuvre, révélée récemment au public, clôt magistralement le mouvement cubiste un siècle après son apparition et sera repérée par des universitaires limousins, peu de temps avant la disparition du peintre, en 2019.

Les photos suivantes illustrent les travaux de Georges Laurent.